Portrait de Sophie Joullié, vigneronne au Mas de Capdaniel

Portrait de Sophie Joullié, vigneronne au Mas de Capdaniel

Direction une appellation du Languedoc qui a la cote, à la rencontre d’une jeune vigneronne qui bichonne ses vieilles vignes. Portrait de Sophie Joullié au Mas de Capdaniel dans l’AOC Terrasses du Larzac...

On est parfois loin des images d’Epinal de vendanges ensoleillées ou de foulages aux pieds quand on pratique le métier de vigneronne. C’est en fin d’une matinée hivernale, au rythme des bourrasques glaciales, que la silhouette gracile de Sophie s’est détachée d’entre les ceps tortueux, couverte jusqu’aux oreilles, harnachée de son ciseau de taille.

A la question ça va, vous n’avez pas trop froid, elle a répondu non, il fait meilleur qu’hier, le vent s’est un peu calmé. Il faut dire que Sophie connaît très bien son terroir et qu’elle a choisi son métier en connaissance de cause.

Cap d’aniel signifie tête d’agneau en occitan. Le Mas de Capdaniel porte le nom de cette ancienne bergerie nichée sur une colline en lisière de garrigue. Un vignoble, à la fois baigné de soleil et rafraichi par l’influence du plateau montagneux du Larzac, conférant à ses vins une complexité aromatique élégante et un équilibre en bouche sur la fraîcheur.

Sophie a toujours habité ici, à Gignac (34), elle a fait ses premiers pas dans ses terres et dans l’allée centrale de la cave de vinification. Quand il a été question de prendre la relève de son père Vincent, après Marcel son grand-père, et Eugène son arrière-grand-père, elle n’a pas hésité longtemps à sauter dans le vin.

Je suis très attachée au lieu, à mes racines, reprendre le domaine n’était pas forcément d’emblée une évidence, j’étais assistante de direction. Aujourd’hui ça l’est !.
Il y a trois ans, elle a suivi une formation à l’Ecole Supérieure de Vin à Rivesaltes, puis s’est installée en tant que jeune agricultrice.

Si la bergerie n’est plus d’actualité, des béliers viennent paître tout l’hiver afin d’entretenir ce beau vignoble de 18 hectares, planté de vieilles vignes de cépages autochtones.

Partons à la rencontre d’une jeune femme souriante, qui croit haut et fort en ses vignes et à son métier...

La WINEista. Pourquoi l’AOC Terrasses du Larzac fait-elle craquer ?

Sophie Joullié : Parce qu’il y a une belle diversité de vins, une multitude de terroirs. En Terrasses du Larzac, on a une trame commune qui s’enrichit de nos spécificités. C’est une appellation dynamique, avec des vigneronnes et vignerons exigeants, cela nous tire tous vers le haut.

La WINEista : Pourriez-vous envisager de faire du vin ailleurs qu’ici ?

S.J. : Non ! Ici c’est la maison !

La WINEista : Qu’est-ce que vous aimez le plus dans votre métier ?

S.J. : Le fait qu’il y en ait plusieurs, on ne s’ennuie jamais. Et puis c’est vraiment passionnant de travailler avec du vivant.

La WINEista : Qu’est-ce que vous redoutez le plus ?

S.J. : Les aléas climatiques, comme la gelée que l’on a subi en 2021. On ne maîtrise pas tout, c’est à la fois le charme et les inconvénients du métier. Il faut faire avec ce que la nature nous offre.

Lisez notre article : Changement climatique, comment les vigneronnes et vignerons s’adaptent à Dame Nature ?

La WINEista : Quel est votre moment préféré de la vigne à la bouteille ?

S.J. : Toutes les étapes sont importantes. Le vin se fait principalement à la vigne, mais la vinification est le moment le plus excitant. J’aime ressentir ce gargouillis de stress qui monte tous les ans avant d’attaquer les vendanges.

La WINEista : Avez-vous rencontré des difficultés en tant que femme dans la filière vin ?

S.J. : Non, je crois qu’il ne faut pas en faire cas et continuer sa route. Je trouve que le monde du vin s’ouvre de plus en plus, il y a de plus en plus de vigneronnes, les mentalités évoluent.

Dégustation au Mas de Capdaniel
Dégustation au Mas de Capdaniel

La WINEista : Quelle bouteille allez-vous déboucher après une journée de taille ?

S.J. : Tout dépend de mon humeur ! Là, j’ai envie de déboucher ma cuvée Le Merle Blanc, un 100% Grenache Gris, le seul cépage blanc du domaine. C’est un vin de gastronomie, avec une jolie complexité au nez, de la matière, une belle fraîcheur. C’est un blanc qui a de la personnalité.

La WINEista : Avec quel plat allez-vous l’accompagner ?

S.J. : Avec une viande blanche en sauce (voir notre recette de blanquette de veau !), un fromage de chèvre ou de brebis, un sorbet citron, même si ce n’est pas trop la saison des glaces en ce moment.

La WINEista : Si vous étiez un cépage, vous seriez lequel ?

S.J. : Le Cinsault ou le Grenache Noir ! Tous nos cépages ont leur place et leur typicité, mais j’aime tout particulièrement la finesse de ces deux cépages.

La WINEista : Avez-vous envie de planter des cépages d’autres pays afin de s’adapter au changement climatique ?

S.J. : Non pas dans l’immédiat. On vient d’arracher deux parcelles que l’on va replanter avec des variétés locales. Je réfléchis à introduire du Macabeu, qui donne des vins blancs frais comme j’aime dans le Roussillon. Demain je ne sais pas, peut-être que le réchauffement climatique nous amènera vers de nouveaux horizons...

La WINEista : Que pensez-vous du Dry January ?

S.J. : Je ne connais pas le Dry January. Pourquoi faire ça ? Un mois sans vin ce n’est pas possible !

La WINEista : Si je vous dis partir en vrille cela vous évoque quoi ?

S.J. : Je viens d’arrêter complètement mon boulot pour reprendre le domaine. J’avais hâte de me consacrer à fond à ce projet, mais certains diront peut-être que je suis partie en vrille...

Merci beaucoup Sophie pour cet échange riche de franchise et de passion. Ce sont des personnes comme vous qui feront l’avenir radieux des vins du Languedoc !

Crédits photos : Audrey Martinez (La WINEista)

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