La désalcoolisation des vins peut-elle être une réponse au changement climatique ?

La désalcoolisation des vins peut-elle être une réponse au changement climatique ?

Le réchauffement climatique n’est pas sans conséquence sur notre breuvage préféré. Comme en témoignent les derniers millésimes, la hausse des températures engendre une augmentation du degré d’alcool des vins.

Pourquoi la hausse du degré d’alcool des vins est-elle problématique ?

Lors de la dégustation, différentes sensations titillent notre bouche. Un vin est qualifié d’"équilibré" quand il est bien ficelé, c’est-à-dire quand aucune sensation ne domine l’autre.

La teneur en alcool est une composante de cet équilibre. Elle est à l’origine de la perception du gras au niveau du palais. Dans le cas de vendanges en surmaturité, une cuvée peut avoir une expression sur la lourdeur, voire même une finale brûlante, préjudiciables à son appréciation et à sa qualité (voir notre article Degré d’alcool d’un vin : quelle influence sur la dégustation ?).

Les consommateurs sont en demande de produits allégés, moins caloriques, à des teneurs en alcool modérées. La désalcoolisation des vins répond donc aussi à des attentes sociétales.

Que faire à la vigne pour limiter le degré d’alcool ?

Lors de la fermentation alcoolique, les sucres naturels des raisins, accumulés dans la pulpe des baies pendant la phase de maturation, sont transformés en alcool (lisez aussi Le vin, une histoire de fermentations). A la vigne, il faut donc réussir à limiter la maturité.

En s’orientant vers des cépages tardifs, comme le Piquepoul Blanc, le Bourboulenc, le Cinsault, le Mourvèdre, faisant la fierté du vignoble languedocien. Ces variétés, qui mûrissent plus lentement, engendrent des vins moins alcoolisés.

De nombreuses études sont en cours afin d’adapter les pratiques viticole à ce nouvel enjeu.
La taille tardive, après 8 à 12 feuilles étalées, peut réduire la teneur en sucres des raisins. Encore faut-il réussir à tailler l’ensemble de sa propriété en un laps de temps aussi réduit ? De plus, cela peut entraîner des pertes significatives de rendement.
Les sucres sont synthétisés par les feuilles pendant la photosynthèse. Un effeuillage tardif, juste au-dessus des grappes, limite la dynamique d’accumulation des sucres. Mais il augmente le risque de brûlure en cas de températures élevées...

Ces dernières années, les vigneronnes et vignerons s’adaptent en vendangeant de plus en plus précocement. Certains récoltent même des parcelles à des maturités différentes, dont les vins seront ensuite assemblés, pour donner un résultat au degré d’alcool modéré.

Que faire au chai ?

Le facteur primordial à l’obtention d’un vin équilibré est la qualité des raisins. Au chai, les marges de manœuvre sont restreintes afin de jouer sur le degré d’alcool.

L'Institut Français de la Vigne et du Vin (IFV) travaille d’arrache-pied pour sélectionner des levures présentant un rendement en alcool moins élevé, tout en ne pénalisant pas la qualité sensorielle des vins. La levure miracle n’est à ce jour pas encore sur le marché...

Comment désalcooliser un vin ?

La solution la plus efficace pour diminuer le degré d’alcool est la désalcoolisation du vin fini, qui permet d’obtenir des cuvées partiellement ou totalement désalcoolisées. Des procédés très pointus et onéreux, réalisés le plus souvent à façon, par des spécialistes.

L’osmose inverse et la nanofiltration, parfois couplées à une distillation, et les colonnes d’extraction à cônes rotatifs, donnent des résultats intéressants, assez respectueux des qualités organoleptiques du vin.

L’Organisation Internationale de la Vigne et du Vin (OIV) est en cours de réflexion afin de définir et d’encadrer ces techniques.
L’élaboration de vins totalement désalcoolisés (< 0,5 % vol) nécessite une reformulation totale, l’ajout d’arômes, de couleur, d’eau..., Des pratiques interdites sur le vin... La question reste donc en suspens : un vin désalcoolisé est-il encore du vin ?

Quant aux cuvées partiellement désalcoolisées, elles devront suivre la réglementation en place sur le vin. Les appellations vont-elles les accepter et vont-elles faire évoluer leurs cahiers des charges ?

Les consommateurs sont à la recherche d’authenticité, de cuvées fières de leurs racines, qui révèlent leurs terroirs et leurs cépages. Alors ces attentes ne sont-elles pas en contradiction avec la désalcoolisation des vins ?

Pour en savoir plus, lisez :
- Changement climatique, quels impacts sur la vigne et le vin de demain ?
- Changement climatique, comment les vigneronnes et vignerons s’adaptent à Dame Nature ?

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