Brettanomyces, une levure redoutée des vinificateurs

Brettanomyces, une levure redoutée des vinificateurs

Il y a des noms que l’on n’ose pas prononcer afin de conjurer le sort. Brettanomyces, cette levure fait bredouiller de terreur les vinificateurs... Pourquoi est-elle tant redoutée ? Comment l’éviter ?

Qui se cache derrière Brettanomyces ?

Les levures sont primordiales en vinification parce que ce sont elles (Saccharomyces cerevisiae) qui réalisent la fameuse fermentation alcoolique permettant de nous délecter de notre cuvée préférée (voir notre article Le vin, une histoire de fermentations).

Brettanomyces, ou "Brett" pour les intimes, est aussi une levure, mais d’un autre genre, celui qu’on préfère éviter.
Elle est relativement résistante à l’alcool, elle peut se développer aisément dans des vins rouges titrant 15 degrés (voir notre article Degré d’alcool d’un vin : quelle influence sur la dégustation ?), elle ne craint pas l’acidité, et certaines souches sont très peu sensibles aux sulfites (voir notre article Les vins sans sulfites).
En résumé, les facteurs limitant la multiplication de la majorité des micro-organismes néfastes pour le vin ne sont pas ou peu efficaces sur Brettanomyces.

On a pensé, au début de son identification dans les années 2000, que son origine provenait de la vigne. Après des études menées par l’Institut Français de la Vigne et du Vin, il a était démontré que les souches retrouvées sur les grappes n’étaient pas les mêmes que celles présentes dans les vins. Les contaminations se font donc au niveau des chais et n’épargnent aucune région viticole.

Pourquoi est-elle tant redoutée ?

Brettanomyces est redoutée parce qu’elle engendre des arômes peu ragoûtants dans les vins, des odeurs animales intenses comme l’écurie, le cuir, la sueur ou l’urine de cheval. Ces parfums peu enchanteurs sont dus à la synthèse de phénols volatils (4-éthyl-phénol, 4-éthyl-gaïacol...) suite à l’action d’une enzyme propre à cette levure.

Ces composés sont très préjudiciables à la qualité parce qu’ils prennent le dessus sur le joli bouquet du vin. Certains les assimilent à un effet terroir, gage d’authenticité et de peu d’intervention de l’être humain sur la nature, alors qu’au contraire ces arômes gomment l’influence du sol et du climat. Une Syrah avec des Brett aura les mêmes notes d’écurie qu’elle soit produite dans le Languedoc ou en Côte-Rôtie.

De plus, les Brettanomyces sont craintes parce qu’il est difficile d’identifier l’origine des contaminations et qu’il n’existe pas de traitement miracle pour s’en débarrasser.

Comment l’éviter ?

En termes de mesures préventives, il est essentiel d’avoir une hygiène irréprochable dans les chais : cuves, manches, pompes, fûts de chêne...
Il est important de maintenir des doses de SO2 actif raisonnées et d’éviter les fermentations languissantes.

On peut aussi réaliser des analyses mensuelles afin de détecter les populations éventuelles avant l’apparition des mauvaises odeurs.
En cas de présence de Brett, différentes solutions peuvent être envisagées (flash-pasteurisation, filtration stérile, traitements avec des produits spécifiques), cependant, elles peuvent parfois perturber les caractéristiques sensorielles des vins traités (perte d’arômes).

Il n’existe pas de solution curative permettant d’éliminer les composés phénolés indésirables tout en garantissant la préservation des qualités organoleptiques des vins.

Brettanomyces représente une menace injuste parce qu’elle touche même les vigneronnes et vignerons qui travaillent bien. Décidément, il n’est pas toujours facile de faire du vin...

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