Georges Duboeuf, la figure du Beaujolais Nouveau

Georges Duboeuf, la figure du Beaujolais Nouveau

C'est le marronnier de novembre, l'événement dont on parle toujours en ce mois pauvre en animations. L'été est déjà loin et les fêtes de Noël pas vraiment encore là : le Beaujolais Nouveau arrive et tombe à pic pour donner un peu de chaleur dans cette période de fraîcheur et de morosité. Et cet événement qui rapproche soudainement les gens entre eux, on le doit aux efforts d'une profession et particulièrement à un de ses hommes : Georges Duboeuf.

Le Beaujolais Nouveau, un amour vache.

“Il a le goût de banane cette année, alors” ? Implacablement, à l'approche de la date du lancement du premier vin de l'année, toute personne possédant des racines ou de simples accointances avec le Beaujolais entend cette phrase. De bonne guerre, qui aime bien châtie bien, parait-il ! Et puis, n'oublions pas que nous sommes en France : en terres gauloises nous prenons toujours plaisir à faire tomber nos statues, surtout si celles-ci sont enviées dans le monde entier. Aujourd'hui, le Beaujolais Nouveau s'exporte aussi bien qu'il se dénigre dans l'hexagone. Pour le meilleur et pour le pire.

Si la pensée populaire croit au coup marketing récent, le Beaujolais Nouveau, appelé “primeur” en Beaujolais, est en réalité assez ancien. On y associe souvent des expressions un peu malhonnêtes que l'on passera sous silence. On y voit des images de Japonais qui se baignent dans des piscines de Beaujolais Nouveau, sans y chercher ni contexte ni atmosphère. On se dit, que finalement ce vin aurait trouvé sa vocation : la vinothérapie. On s'attarde sur des frasques certes véridiques, mais singulières, qui ont donné ces fameux arômes du fruit jaune, une année. Finalement, on parle de “la sortie du Beaujolais” et on ne sait même plus qu'il est proposé d'autres vins plus conventionnels, les 364 autres jours restants. L'impertinence a effacé le reste.

On a tendance à en oublier le meilleur, que le Beaujolais Nouveau est un étendard, celui de la culture française, dressé chaque année dans le monde entier. Ce vin dégusté à l'unisson aux quatre coins du globe, aucune entreprise aussi puissante soit-elle n'est arrivée à en reproduire le phénomène. Au Japon, pays leader des exportations, on y célèbre l'art de vivre à la française, dans une ambiance luxueuse : les défilés de mode s'enchaînent en son nom, les célébrités s'affichent avec les vignerons. Les stars ne sont pas celles du reste de l'année. On le déguste sans se prendre la tête, on se concentre sur l'essentiel : le partage et les bons moments que l'on passe ensemble. Cela devrait être l'essence même du vin.

Ce qui est d'autant plus merveilleux, c'est que l'on parle ici d'un vin artisanal. N'en déplaise à ses détracteurs, les Beaujolais Nouveaux sont réalisés selon des critères de qualité très élevés, similaires aux autres vins. Et, il inspire. Bernard Pivot, l'enfant du pays devenu journaliste culturel en fait son apologie : "fripon, espiègle, polisson, canaille, voyou, oui ; escroc, non".

Cette renommée, celle qui permet la diffusion massive d'un symbole français est à créditer au “Pape du Beaujolais”, comme Paul Bocuse, un autre pontif aime l'appeler.

Georges Duboeuf : le Beaujolais, passionnément

Ils sont nombreux chaque année, les vignerons du Beaujolais, à prendre un avion pour faire découvrir leur primeur au monde. Georges Duboeuf, le plus grand négociant du Beaujolais et qui arrose la Terre entière de ses vins aux étiquettes colorées, en fait partie. Avant d'être reçu comme un chef d'Etat dans tous les pays où il passe, le natif de Bourgogne (sic) a avancé avec la passion beaujolaise solidement vissée au coeur.

Bien qu'issu d'une famille de viticulteurs en 1933, le jeune Georges s'oriente vers une carrière bien éloignée de ses parents. Il veut être kiné et part à Paris pour s'y former.  Je passais entre deux heures et deux heures et demi dans les transports ! Je me suis dit que ce n'était pas possible ! J'ai préféré rentrer chez moi !  relate-t-il dans le Journal de Saône et Loire. Il se tourne donc naturellement vers la profession évidente. Et il va l'embrasser ardemment.

Dans les années 1950, il parcourt la campagne pour vendre ses bouteilles “embouteillées-maison”, à vélo. Cela ne fait pas du tout à l'époque, on achète du vrac, du cubit. Au culot, Il rencontre les Chefs montants tels que Bocuse, Trois-Gros, Paul Blanc. A l'affût du bon coup, il troque la bicyclette pour un camion de don du sang transformé en machine à embouteiller, pour le faire chez les autres. Il vient d'inventer l'embouteillage ambulant à domicile et connaît le succès.

En 1964, il crée sa société de négoce (Les Vins Duboeuf) et soutient la ferveur du Beaujolais Nouveau. Il s'en empare réellement dans les années 1980 pour lui faire passer un cap : le lancement du Beaujolais Nouveau devient un événement international, sous son impulsion. Georges affrète des TGV entiers depuis Paris jusqu'à Romanèche-Thorins où son siège est situé. Se mêlent célébrités, vignerons et journalistes qui festoient la veille du troisième jeudi de novembre. A minuit, tout le monde sort regarder partir les camions qui acheminent le précieux breuvage sur les routes. “En 1988, l'un des invités à Romanèche est le célèbre acteur de western James Coburn. Sur son cheval, la star américaine ouvre la voie aux camions pour rejoindre l'aéroport de Lyon.“ raconte le site des Beaujolais Nouveaux.

De grands moyens pour de grands résultats puisque le Beaujolais va connaître sa notoriété internationale par ce biais. Aujourd'hui, Georges a 84 ans et il prend sa retraite, même s'il reste dans les parages. Mais le flambeau est passé à son fils, Franck ainsi qu'à ses petits-enfants.

Les Français ne sont pas encore prêts d'arrêter de fustiger ce vin impertinent chaque année. Mais finalement, le veulent-ils ? Attention, les Beaujolais Nouveaux arrivent bientôt !

Publié , par Matthieu Pélissier
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